L’activiste Paluku Sindani Lumumba s’indigne de
la manipulation des radios par les politiciens à Béni au Nord-Kivu, à l’Est du
pays. A la veille des élections, ces derniers s’accaparent de plus en plus les
médias pour être réélus.
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Lumumba en pleine emission |
Ces dernier temps, pour des raisons
électoralistes, les radios locales n’éclairent presque plus l’opinion publique
sur le profil d’un candidat idéal, car ces médias sont déjà confisqués par les
élus nantis. Pourtant, un accès libre et égalitaire aux médias est une des
conditions pour que l’on qualifie une élection de libre et impartiale.
J’ai interviewé Paluku Sindani « Lumumba »
(surnommé ainsi pour son militantisme). Ce jeune activiste ne cesse de dénoncer
cette prise en otage des radios locales par les politiciens.
Pourquoi t’intéresses-tu aux émissions électorales
éducatives ?
Lumumba :
Etant instruit, je me suis donné le travail de combattre le mal. Ce mal est
caractérisé par le fait que les radios, au lieu d’émanciper la population sur
les questions électorales, accordent leurs temps de paroles aux élus locaux qui
tentent de se faire réélire pour les prochaines élections de 2016.
Pourquoi es-tu inquiet de cette propagande
politicienne ?
Lumumba :
Je ne suis pas seulement inquiet… Je suis nerveux, parce que 80% de nos élus
locaux sont démagogues. Cela fait plusieurs années qu’ils sont élus. Ils
passent leurs vacances parlementaires en Occident avec leurs familles oubliant
ainsi la base. C’est maintenant à la veille des élections qu’ils rentrent en
faisant beaucoup de bruit. Ils vantent les dons qu’ils font aux écoliers et la
réhabilitation de quelques avenues, ponts… A mon avis, restituer leur bilan au
Parlement serait l’idéal pour que la population puisse se rendre compte de
leurs activités.
En tant qu'analyste politique, pourquoi les médias
sont-ils ainsi manipulés selon toi ?

Lumumba :
Les médias privés, d’ailleurs nombreux dans notre pays, ne sont pas
subventionnés par notre gouvernement. Pour survivre, ils se courbent devant les
donations des nantis, dont les députés. « La main qui donne est toujours
supérieur à celle qui reçoit », dit-on. Ces radios étant redevables, manipulent
la population au profit de ces donateurs qui ont déjà postulé pour les
prochaines élections.
Cette prise en otage des radios a-t-elle des
conséquences sur le bon déroulement des élections ?
Lumumba : Oui! Non
seulement la population reste dans l'ignorance mais les nouveaux candidats aux
prochaines échéances électorales sont étouffés. Ils n’ont pas les moyens pour
acheter les espaces médiatiques. Résultat, ils n’ont pas la chance de véhiculer
leurs projets de société auprès des habitants.
En tant qu’activiste, tu es confronté aux mêmes
difficultés. Réussis-tu à relever le défi ?
Lumumba : Difficilement. J’ai
réussi à décrocher une émission gratuite dans l’une des radios de la place.
Désormais, j’ai un espace où défilent les nouveaux candidats pour présenter
leur projet de société. Aussi, je discute avec les jeunes dans les rues et dans
des universités autour de l’utilité de voter pour un bon candidat afin de
barrer la route à ceux qui donnent des cadeaux.
La population a besoin de changement.
J’encourage d’autres activistes à rejoindre Lumumba dans cette lutte afin de
combattre les manipulations auxquelles font face les électeurs. Votons pour un
projet de société et méfions-nous des cadeaux et des manipulations ethniques.
Mustapha Mulonda